dimanche 5 novembre 2017

Yéshoua, ses disciples et la Torah

Partie 1 : un rabbin nommé Yéshoua

Le christianisme, estiment la plupart des chrétiens, a remplacé le judaïsme et la Torah a été abolie par Jésus. Il est notable cependant que rien de tel n’a jamais été enseigné par ni Jésus ni par ses apôtres.  Au contraire, Jésus déclare:

«  Ne croyez pas que je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes;  Je suis venu non pour abolir, mais pour accomplir.  Car, je vous le dis en vérité, tant que le ciel et la terre ne passeront point, Il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota ou un seul trait de lettre,  jusqu’à ce que tout soit arrivé. Celui donc qui supprimera l’un de ces plus petits commandements,  Et qui enseignera aux hommes à faire de même,  sera appelé le plus petit dans le royaume des cieux;  mais celui qui les observera,  et qui enseignera à les observer,  celui-là sera appelé grand dans le royaume des cieux. »   (Matthieu 5 :17-19)

Rabbi Jacob Emden, dans son « Resen Mateh », affirma en référence à ceci qu’ « aucun de nos sages n’a parlé plus emphatiquement à propos de l’éternité de la Torah » ואין אחד מחכמינו שדיבר יותר מזה בפה מלא בחיוב קיום נצחי לתורה. Notons qu’il est bien paradoxal qu’un rabbin juif ait correctement saisi les propos de Jésus et que la chrétienté,  qui se réclame de lui, enseigne encore malgré cette affirmation plus qu’explicite que Jésus a fondé une nouvelle religion ou proclama que la Torah n’est plus à suivre. Il conviendrait tout d’abord, afin de mieux comprendre les passages des évangiles cités par les chrétiens pour soutenir ce qu’ils avancent, de savoir qui était Jésus et de connaître le contexte culturel et religieux dans lequel s’enracine son enseignement.

Né au sein d’une famille juive, Jésus ou Yéshoua de son nom hébreu a été élevé, selon l’évangile de Luc, dans la plus pure tradition de ses ancêtres. Il fut circoncis le huitième jour après sa naissance et fut porté par ses parents à Jérusalem, « pour être présenté au Seigneur, suivant ce qui est écrit dans la loi » (Luc 2 :21-23). Sa famille avait l’habitude d’ « aller chaque année à Jérusalem, à la fête de Pâque » (Luc 2 :41). Luc rapporte que Yéshoua, qui n’avait alors que douze ans, fut trouvé au Temple en train de discuter de la Torah avec des rabbins qui « étaient frappés de son intelligence et de ses réponses » (Luc 12 :42-51). Paul lui-même ne pouvait nier que «  Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme, né sous la loi » (Galates 4:4). Même adulte, Yéshoua n’a pas rompu avec son héritage juif. Il fréquentait la synagogue et continuait à y prier chaque jour de Shabbath (Luc 4:16, Matthieu 13 :54). Il apparaît même qu’il participait activement au culte synagogual. Luc nous dit par exemple que Yéshoua était invité à lire la Haftarah, un passage du livre des prophètes qui est lu publiquement à la synagogue pendant le Shabbath et les fêtes juives (Luc 4 :16-17). Même sa manière de s’habiller était juive. En effet, il obéissait au commandement de la Torah prescrivant le port des tsitsioth (franges) accrochées aux quatre coins des vêtements (Matthieu 9:20, Marc 6:56, Luc 8:44 cf Nombres 15 :38). En outre, selon le récit synoptique, Yéshoua dit au lépreux qu’il a guéri d’offrir les sacrifices prescrits par Moïse (Marc 1 :44 , Matthieu 8 :4 et Luc 5 :14).  

Comme on peut le voir en Matthieu 5 :17-21, Yéshoua enseigne le suivi de la Torah. Ainsi, lorsque l’homme riche lui a demandé ce qu’il fallait faire pour avoir part à la vie éternelle, Yéshoua lui répondit simplement : « observe les commandements » (Matthieu 19:16-17, Marc 10:17-19, Luc 18:18-20).  « Priez », dit Yéshoua en référence à la tribulation précédant la venue du Fils de l’Homme, « pour que votre fuite n’arrive pas en hiver, ni un jour de sabbat » (Matthieu 24:10). La loi prescrivant l’observance du Shabbath est donc toujours en vigueur et le sera encore pendant les temps de la fin.  Ceci explique pourquoi après sa crucifixion,  ses disciples  « se reposèrent le jour du sabbat, selon la loi »  (Luc 23 :56). Yéshoua estimait aussi que les porcs et les chiens étaient des animaux impurs (Matthieu 7 :6), conformément à ce que dit la loi (Lévitique 11). Il honorait également la loi orale et les traditions pharisiennes, comme en atteste la tradition synoptique:

« Malheur à vous, Scribes et Pharisiens hypocrites;
car vous payez la dîme de la menthe, de l’aneth et du cumin;
 et vous laissez les choses les plus importantes de la Loi,
c’est-à-dire, le jugement, la miséricorde et la fidélité;
 il fallait faire ces choses-ci, et ne laisser point celles-là » (Matthieu 23 :23)

« Mais malheur à vous, Pharisiens;
car vous payez la dîme de la menthe, et de la rue,
et de toute sorte d’herbage,
et vous négligez le jugement et l’amour de Dieu :
il fallait faire ces choses-ci, et ne laisser point celles-là » (Luc 11 :42)

Notons que « la dîme de la menthe, de l’aneth et du cumin » se retrouve seulement dans la Torah orale qui a été plus tard codifiée dans la Mishnah (ma’assérot 4:5) et non dans la Torah écrite qui ne prescrit que la dîme des «  fruits  des arbres » et de la « semence du sol », c'est à dire des graines (Lévitique 17 :30). Ici, Yéshoua ne critique pas la dîme des herbes. Au contraire, il dit qu’il ne faut « point laisser » ce qui n’est pourtant pas écrit noir sur blanc dans le Pentateuque.  De même, la lecture synagogale de la Haftarah qu’a effectué Yéshoua « selon sa tradition » n’est pas une prescription de la Torah, mais une simple tradition pharisienne (Luc 4:16).  D’après Matthieu 23 :2-3, Yéshoua aurait prescrit à ses disciples :

« Les scribes et les pharisiens sont assis dans la chaire de Moïse.
Faites donc et observez tout ce qu’ils vous disent;
 mais n’agissez pas selon leurs oeuvres.
Car ils disent, et ne font pas » (Matthieu 23 :2-3 )

Quelques uns  qui trouvent ce texte dérangeant avancent que selon un manuscrit hébreu de Matthieu, Yéshoua n’aurait jamais dit à ses disciples d’obéir aux pharisiens. Cependant, comme nous l’avons démontré ailleurs, ce n’est  pas ce que dit le texte hébreu en question et il n’y a aucune de raison de soupçonner que le texte grec ait été trafiqué à cet endroit.  Selon la tradition évangélique ancienne qu’a reprise l’évangile copte de Thomas, les pharisiens sont ceux qui détiennent la « clé de la connaissance », c’est à dire la tradition légitime héritée de Moïse (Thomas 39). Yéshoua adhéra donc à l’interprétation pharisienne de la loi. Pour reprendre les propos de David Flusser, un chercheur juif : « Les évangiles apportent des preuves suffisantes pour dire que Jésus ne s’est opposé à aucune prescription de la loi mosaïque écrite ou orale, et qu’il a même accompli les commandements religieux juifs ».

Non seulement Yéshoua observait la loi comme un pharisien mais il s’exprime aussi comme un pharisien ainsi que nous allons le voir par quelques exemples. 

Yéshoua :
  « Heureux les miséricordieux,  car ils obtiendront miséricorde! »  
(Matthieu 5 :7 )

Pharisiens :
« Celui qui est miséricordieux envers les créatures,  miséricorde lui sera faite par les Cieux,  tandis que celui qui n’est pas miséricordieux envers les créatures,  miséricorde ne lui sera pas faite par les Cieux »
כל המרחם על הבריות מרחמין עליו מן השמים וכל שאינו מרחם על הבריות אין מרחמין עליו מן השמים
(Talmud de Babylone Shabbath 151b)

Yéshoua :
« Heureux serez-vous, lorsqu’on vous outragera,  qu’on vous persécutera et qu’on dira faussement de vous toute sorte de mal,  à cause de moi. Réjouissez-vous et soyez dans l’allégresse,  parce que votre récompense sera grande dans les cieux;  car c’est ainsi qu’on a persécuté les prophètes qui ont été avant vous. »  (Matthieu 5 :12-13 )

Pharisiens :
« Ceux qui sont humiliés  et n’humilient pas,  ceux qui sont insultés et ne répondent pas,  ceux qui agissent avec amour  et se réjouissent dans les chagrins,  à propos d’eux l’écriture déclare : ceux qui l’aiment sont comme le soleil quand il parait dans sa force (Juges 5 :31)»
עלובין ואינן עולבין שומעין חרפתן  ואינן משיבין  עושין מאהבה ושמחין ביסורין עליהן הכתוב אומר   ואוהביו כצאת השמש בגבורתו
(Talmud de Babylone, Shabbath 88b)

Yéshoua:
« Car, je vous le dis en vérité,  tant que le ciel et la terre ne passeront point,  il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota (yod)  ou un seul trait de lettre » (Matthieu 5 :18)

Pharisiens :
« Si tous ceux qui viennent dans le monde s’assemblaient pour enlever un Yod, la plus petite lettre, de la Torah, ils n’y arriveraient pas. De qui l’as-tu appris ? Du Roi Salomon, car dès qu’il demanda à enlever un Yod de la Torah, son plaignant est monté [devant la présence de Dieu]. Et qui était le plaignant ? R. Yehoshoua ben Lévi dit : Le plaignant était le Yod de la Torah. R. Shime’on bar Yo’haï dit : Le livre du Deutéronome est monté et se prosterna devant le Saint béni Soit-il, et lui dit : Seigneur de l’univers ! Tu as écrit dans la Torah qu’un testament en partie aboli est entièrement aboli. Et Salomon cherche à enlever un Yod de la Torah. Le Saint Béni soit-il lui dit : Salomon et une centaine de ses semblables périront mais aucun Yod en toi ne sera jamais aboli »
אם מתכנשין כל באי עולם לעקור יו"ד שהוא קטן האותיות שבתורה, אינן יכולין. ממי את למד? משלמה המלך, שעל ידי שבקש לעקור יו"ד מן התורה עלה קטיגורו. ומי קטרג ? ר’ יהושע בן לוי אמר: יו"ד שבירבה קטרג. ר’ שמעון בן יוחאי אומר: ספר משנה תורה עלה ונשתטח לפני הקדוש ברוך הוא, ואמר לפניו: רבונו של עולם! כתבת בתורתך דייתיקי, שמקצתה בטלה כולה בטלה, שלמה המלך מבקש לעקור יו"ד שבתורה! אמר לו הקב"ה: לך הרי שלמה בטל ומאה כיוצא בו, ויו"ד שבך אינו בטל לעולם
(Midrash Rabbah Shir hashirim 5:12)

Yéshoua:
« Quiconque se met en colère contre son frère mérite d’être puni par les juges; que celui qui dira à son frère: « Raca! » mérite d’être puni par le sanhédrin; et que celui qui lui dira: « Insensé! » mérite d’être puni par le feu de la géhenne » (Matthieu 5 :22)

Pharisiens :
« Celui qui appellera son prochain « rasha »  (méchant) sera jeté dans le guéhinom »
כל מאן דקרי לחבריה רשע, נחתין ליה לגיהנם
(Zohar Shémot 122a)

« Celui qui fait honte à son prochain en public n’a pas de part au monde à venir » 
והמלבין פני חברו ברבים אין לו חלק לעולם הבא
(Mishnah Avot 3 :11)

« Il a été enseigné : si quelqu’un appelle son prochain « ‘eved » (esclave), qu’il soit excommunié,  « mamzer » (bâtard)  qu’il recoive quarante coups de fouets »
הקורא לחביריו עבד יהא בנידוי ממזר סופג את הארבעים
(Talmud de Babylone Qiddoushin 28)

Yéshoua :
« Si donc tu présentes ton offrande à l’autel, et que là tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre toi, laisse là ton offrande devant l’autel, et va d’abord te réconcilier avec ton frère; puis, viens présenter ton offrande. » (Matthieu 5 :23-24)

Pharisiens :
« Yom Kippour expie les péchés qu’une personne a commis envers Dieu, mais pas ceux qu’elle a commis envers son prochain, jusqu’ à ce qu’elle apaise son prochain »
יום הכפורים מכפר עבירות שבין אדם לחבירו אין יום הכפורים מכפר עד שירצה חבר
(Mishnah Yoma 8 :9)

Yéshoua :
« Quiconque regarde une femme et la désire, a commis un adultère avec elle dans son cœur » (Matthieu 5 :28)

Pharisiens :
« Celui qui commet un adultère avec ses yeux est appelé adultère »
נואף בעיניו נקרא נואף
(Midrash Vayikra Rabbah 23 :12)

Yéshoua :
« Si ton œil droit t’offense, arraches-le et jettes-le de toi, car il est mieux pour toi que l’un des tes membres soient détruits plutôt que tout ton corps ne soit jeté dans la Géhenne. Et si ta main droite t’offense, coupes-la et jettes-la de toi, car il est mieux pour toi que l’un de tes membres soient détruits plutôt que tout ton corps ne soient jette dans la Géhenne »  (Matthieu 5 :29-30)

Pharisiens :
« Rabbi Tarfon dit : que celui qui touche son membre viril ait sa main coupée sur son ventre. Mais son ventre sera fendu ! Ont-ils dit à Rabbi Tarfon. Il leur dit : il est préférable que son ventre soit fendu plutôt qu’il descende dans la fosse »
רבי טרפון כל המכניס ידו למטה מטבורו תקצץ אמרו לו לרבי טרפון ישב לו קוץ בכריסו לא יטלנו אמר להן לא והלא כריסו נבקעת אמר להן מוטב תבקע כריסו ולא ירד לבאר שחת
(Talmud de Babylone, Niddah 13b)

Yéshoua :
« Je vous dis de ne jurer aucunement, ni par le ciel, parce que c’est le trône de Dieu; ni par la terre, parce que c’est son marchepied; ni par Jérusalem, parce que c’est la ville du grand roi. Ne jure pas non plus par ta tête, car tu ne peux rendre blanc ou noir un seul cheveu » (Matthieu 5 :34-38)

Pharisiens :
« Rav Dimi, le frère du Rav Safra répéta la tradition tannaïtique: Celui qui prête serment, même s’il a accompli son serment, est appelé pécheur » 
תני רב דימי אחוה דרב ספרא כל הנודר אע"פ שהוא מקיימו נקרא חוטא
(Talmud de Babylone Nédarim 77b)

Yéshoua :
« Que votre parole soit oui, oui, non, non; ce qu’on y ajoute vient du malin. »  (Matthieu 5 :37)

Pharisiens :
« Le oui des justes et est un oui, et leur non est un non »
« Ton oui doit être juste et ton non doit être juste »
הצידקים הן שלהן הן ולאו שלהן לאו
הן שלך צדק ולאו שלך צדק
(Midrash Ruth Rabbah 7:6 et Talmud de Babylone Baba métsia 49a)

Yéshoua :
« Je vous dis de ne pas résister au méchant. Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre » (Matthieu 5 :39)

 Pharisiens :
« Ceux qui sont humiliés  et n’humilient pas,  ceux qui sont insultés et ne répondent pas,  ceux qui agissent avec amour  et se réjouissent dans les chagrins,  à propos d’eux l’écriture déclare : ceux qui l’aiment sont comme le soleil quand il parait dans sa force (Juges 5 :31)»
עלובין ואינן עולבין שומעין חרפתן  ואינן משיבין  עושין מאהבה ושמחין ביסורין עליהן הכתוב אומר   ואוהביו כצאת השמש בגבורתו
(Talmud de Babylone, Shabbath 88b)

Yéshoua:
« Gardez-vous de pratiquer votre justice devant les hommes, pour en être vus; autrement, vous n’aurez point de récompense auprès de votre Père qui est dans les cieux. Lors donc que tu fais l’aumône, ne sonne pas de la trompette devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues et dans les rues, afin d’être glorifiés par les hommes. Je vous le dis en vérité, ils reçoivent leur récompense. Mais quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite, afin que ton aumône se fasse en secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra » (Matthieu 6 :1-3)

Pharisiens :
« Celui qui pratique la tsédaqah (la charité) en secret est plus grand que Moïse notre Maitre ... Qu’est ce qui sauve un individu d’une mort surnaturelle ? Quand il donne sans savoir à qui il donne, et que le mendiant reçoit sans savoir de qui il a reçu »
גדול העושה צדקה בסתר יותר ממשה רבינו ... אי זו היא שמצילתו ממיתה משונה נותנה ואינו יודע למי נותנה נוטלה ואינו יודע ממי נוטלה
(Talmud de Babylone, Baba Bathra 9a-10b)

Yéshoua :
« Lorsque vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites, qui aiment à prier debout dans les synagogues et aux coins des rues, pour être vus des hommes. Je vous le dis en vérité, ils reçoivent leur récompense. Mais quand tu pries, entre dans ta chambre, ferme ta porte, et prie ton Père qui est là dans le lieu secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. » (Matthieu 6:5-7)

Pharisiens :
« Celui qui prie afin qu’on puisse l’entendre est de ceux qui ont peu de foi, et celui qui élève la voix pendant la prière est un faux prophète »
המשמיע קולו בתפלתו הרי זה מקטני אמנה המגביה קולו בתפלתו הרי זה מנביאי השקר
(Talmud de Babylone Bérakhot 24b)

Yéshoua :
« En priant, ne multipliez pas de vaines paroles, comme les païens, qui s’imaginent qu’à force de paroles ils seront exaucés. Ne leur ressemblez pas; car votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant que vous le lui demandiez »  (Matthieu 5 :7-8)

Pharisiens :
« Les paroles d’un homme doivent être peu nombreuses devant le Saint béni soit-il, car il est dit : Ne te presse pas d’ouvrir la bouche, et que ton coeur ne se hâte pas d’exprimer une parole devant Dieu ; car Dieu est aux cieux, et toi sur la terre: que tes paroles soient donc peu nombreuses (Ecclésiastes 5 :2) »
 יהיו דבריו של אדם מועטין לפני הקב"ה שנאמר  אל תבהל על פיך ולבך אל ימהר להוציא דבר לפני האלהים כי האלהים בשמים ואתה על הארץ על כן יהיו דבריך מעט
(Talmud de Babylone Bérakhot 51a)

Yéshoua :
« Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus vos offenses » (Matthieu 6 :14-15)

Pharisiens :
«  Les péchés de qui Dieu pardonne t-il? Les péchés celui qui pardonne les péchés »
למי נושא עון למי שעובר על פשע
(Talmud de Babylone Rosh Ha-shanah 17a)

Yéshoua :
« Ne vous amassez pas des trésors sur la terre, où la teigne et la rouille détruisent, et où les voleurs percent et dérobent; mais amassez-vous des trésors dans le ciel, où la teigne et la rouille ne détruisent point, et où les voleurs ne percent ni ne dérobent. Car là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur » (Matthieu 6 :19-21)

Pharisiens :
« Le roi Monobaz se leva et abandonna tous ses biens aux pauvres. Ses proches le firent venir et lui dirent : Tes pères ont ajouté à leurs richesses et à celles de leurs pères, et toi tu abandonnes tes richesses et celle de tes pères. Il leur dit : Tout ce que mes pères ont amassé, ils l’ont amassé sur terre. Mais moi j’amasse dans les cieux  ....  ... Mes pères ont amassé dans un lieu accessible à la main, mais moi j’amasse dans un lieu qu’aucune main ne peut atteindre ... Mes pères ont amassé pour d’autres, mais moi j’amasse pour moi même ... Mes pères ont amassé dans ce monde, mais moi j’amasse pour le monde à venir »
מונבז המלך עמד ובזבז כל נכסיו לעניים שלחו לו קרוביו ואמרו לו אבותיך הוסיפו על שלהן ועל של אבותיהן ואתה ביזבזתה את שלך ואת של אבותיך א"ל כל שכן אבותי גנזו בארץ ואני גנזתי בשמים  ... אבותי גנזו במקום שהיד שולטת בו ואני גנזתי במקום שאין היד שולטת בו  ... אבותי גנזו לאחרים ואני גנזתי לעצמי ... אבותי גנזו בעולם הזה ואני גנזתי לעולם הבא
(Talmud de Jérusalem Péah 3 :1)

Yéshoua :
« Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus. La vie n’est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement? Regardez les oiseaux du ciel: ils ne sèment ni ne moissonnent, et ils n’amassent rien dans des greniers; et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux? Qui de vous, par ses inquiétudes, peut ajouter une coudée à la durée de sa vie? Et pourquoi vous inquiéter au sujet du vêtement? Considérez comment croissent les lis des champs: ils ne travaillent ni ne filent; cependant je vous dis que Salomon même, dans toute sa gloire, n’a pas été vêtu comme l’un d’eux. Si Dieu revêt ainsi l’herbe des champs, qui existe aujourd’hui et qui demain sera jetée au four, ne vous vêtira-t-il pas à plus forte raison, gens de peu de foi? Ne vous inquiétez donc point, et ne dites pas: Que mangerons-nous? Que boirons-nous? De quoi serons-nous vêtus? Car toutes ces choses, ce sont les païens qui les recherchent. Votre Père céleste sait que vous en avez besoin. Cherchez premièrement le royaume et la justice de Dieu; et toutes ces choses vous seront données par-dessus » (Matthieu 6 :25-33)

         Pharisiens :
« Dans ma vie, je n’ai jamais vu un cerf [sécher] des figues ou un lion qui porte un fardeau ou bien un renard tenir une boutique. Cependant, ils subsistent sans difficulté. Or, ceux là n’ont été créés que pour me servir et moi j’ai été créé pour servir mon Créateur.  Donc si ceux qui n’ont été créé que pour me servir sont nourris sans difficulté, combien plus devrais-je, moi qui fus créé pour servir mon Créateur, être nourri sans difficulté ? »
מימי לא ראיתי צבי קייץ וארי סבל ושועל חנוני והם מתפרנסים שלא בצער והם לא נבראו אלא לשמשני ואני נבראתי לשמש את קוני מה אלו שלא נבראו אלא לשמשני מתפרנסים שלא בצער ואני שנבראתי לשמש את קוני אינו דין שאתפרנס שלא בצער
(Talmud de Babylone Qidoushin 82b)

« Celui qui a un morceau de pain dans sa corbeille mais qui dit: Que mangerais-je demain? N’est rien d’autre que de ceux qui ont peu de foi »
כל מי שיש לו פת בסלו ואומר מה אוכל למחר אינו אלא מקטני אמנה
(Talmud de Babylone Sotah 48b)

Yéshoua :
« Ne vous inquiétez donc pas du lendemain; car le lendemain aura soin de lui-même. A chaque jour suffit sa peine » (Matthieu 6 :34)

Pharisiens :
« Ne t’afflige pas de la peine du lendemain »
אל תצר צרת מחר
(Talmud de Babylone Sanhédrin 100b)

Yéshoua :
« Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés » (Matthieu 7 :1)

Pharisiens :
« Ne juge pas ton prochain avant d’avoir été à sa place »
אל תדין את חברך עד שתגיע למקומו
(Pirké avot 2 :4)

Yéshoua :
« Car on vous jugera du même jugement dont vous jugez; et on vous mesurera de la même mesure dont vous mesurez »  (Matthieu  7 :2)

Pharisiens :
« Un homme est mesuré de la mesure avec laquelle il mesure »
במידה שאדם מודד, בה מודדין לו
(Mishnah Sotah 1 :7)

Yéshoua :
«   Le brin de paille qui est dans l’oeil de ton frère,   tu le vois, mais la poutre qui est dans ton oeil, tu ne la vois pas.  Quand tu auras rejeté la poutre de ton oeil,  alors tu verras clair  pour rejeter le brin de paille de l’oeil de ton frère » (Evangile de Thomas  logion 26, Matthieu 7 :3-5)
     
       Pharisiens :
« Il lui dit: enlève la paille qui est dans ton oeil, mais il lui répondit: enlève la poutre qui est dans ton œil »
אומר לו טול קיסם מבין עיניך אומר לו טול קורה מבין עיניך
(Talmud de Babylone Bava Bathra 15b)

Yéshoua :
« Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux, car c’est la loi et les prophètes »  (Matthieu 7 :12)

« Ce que vous récusez, ne le faites pas » (évangile de Thomas logion 6)

Pharisiens :
« Ce que tu détestes, ne le fais pas aux autres, voilà toute la Torah, le reste n’est que commentaire »  (Rabbi Hillel)
דעלך סני לחברך לא תעביד זו היא כל התורה כולה ואידך פירושה הוא
(Talmud de Babylone Shabbath 21a)

Yéshoua:
 « Celui qui conservera sa vie la perdra, et celui qui perdra sa vie à cause de moi la retrouvera  » (Matthieu 10:39 , Luc 17 :33)

Pharisiens :
« Que doit faire un homme s’il veut vivre? Ils lui dirent: Qu’il meure. Et que doit faire un homme s’il veut mourir? Qu’il vive »
מה יעביד איניש ויחיה אמרו ליה ימית עצמו מה יעביד איניש וימות יחיה את עצמו
(Talmud de Babylone Tamid 32a)

Yéshoua :
« Quiconque s’élèvera sera abaissé, et quiconque s’abaissera sera élevé » (Matthieu 23:12)

Pharisiens :
« Tous ceux qui s’abaissent pour la Torah dans ce monde, seront élevés dans le monde à venir »
כל המקטין עצמו על דברי תורה בעוה ב"נעשה גדול לעוה
(Talmud de Babylone Bava Métsia 45b)

Yéshoua :
« Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas on ôtera même ce qu’il a » (Matthieu 25 :29)

Pharisiens :  
« Le Saint béni soit-il ne donne de la sagesse qu’à celui qui en a »
אין הקב״ה נותן הכמה אלא למי שיש בו תכמה
(Talmud de Babylone Bérakhot 5a)

Yéshoua :
« Le Sabbat a été fait pour l’homme, et non l’homme pour le Sabbat »  (Marc 2:27)

Pharisiens :
« C’est à vous que le Shabbath a été confié, mais vous n’avez pas été confiés au Shabbath »
לכם שבת מסורה ואי אתם מסורים לשבת
(Mékhilta dérabbi Yishmael ki Tissa 31)

Yéshoua :
« Puis il leur dit: Dans quelque maison que vous entriez, restez-y jusqu’à ce que vous partiez de ce lieu » (Marc 6 :10)

Pharisiens :
« Rabbi Yéhoudah dit au nom de Rav : D’où [la règle selon laquelle] un homme ne doit pas changer son hébergement [est-il dérivé] de la Torah ? Il est dit : « [Il (Abraham) dirigea ses marches du midi jusqu’à Béthel]  jusqu’au lieu où était sa tente au commencement » (Genèse 13 :3) »
אמר רב יהודה אמר רב מנין שלא ישנה אדם באכסניא שלו מן התורה שנאמר עד המקום אשר היה שם אהלו
(Talmud de Babylone Arakhîn 16b)

Yéshoua :
« Pour ce qui est du jour ou de l’heure, personne ne le sait, ni les anges dans le ciel, ni le Fils, mais le Père seul. Prenez garde, veillez et priez; car vous ne savez quand ce temps viendra. » (Marc 13 :32-34 , Matthieu 24 :36 )

« Sachez-le bien, si le maître de la maison savait à quelle heure le voleur doit venir, il veillerait et ne laisserait pas percer sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts, car le Fils de l’homme viendra à l’heure où vous n’y penserez pas » (Luc 12 :39-40)

Pharisiens :
« Il y a trois choses sur lesquelles on tombe  quand on ne s’y attend pas ? les voici : le Messie, un objet trouvé et un scorpion »
 ג באין בהיסח הדעת אלו הן משיח מציאה ועקרב
(Talmud de Babylone Sanhédrin 97a)

Yéshoua :
« Soyez donc miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux »  (Luc 6:36)

Pharisiens :
« Soyez miséricordieux sur la terre comme je suis miséricordieux dans les cieux »
היכמא דאנא רחמן בשמיא כן תהוון רחמנין בארעא
(Targoum de Jonathan ben Ouziel sur  le Lévitique 22 :28)

Yéshoua :
« Ne nous induis pas en tentation » (Luc 11 :4, Matthieu 6 :13)

Pharisiens :
« Rabbi Yéhoudah dit : L’homme doit veiller soigneusement sur lui en tout temps, pour qu’il ne s’induise lui-même pas en tentation, car David s’induisit lui-même en tentation et tomba. Il dit à Dieu: « O Maître du monde, pourquoi t’appelle-t-on le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ? ». Dieu lui répondit : « Ces trois patriarches ont été tentés par moi, mais toi, tu n’a pas été tenté ». David répliqua : « O Seigneur du monde, éprouve-moi et tente moi aussi » comme il est écrit : « Sonde-moi, Eternel! éprouve-moi » (Psaumes 26 :2). Dieu répondit : « Je te tenterai et je te ferais un privilège spécial car quand j’éprouvais les trois patriarches, je ne les prévins pas à l’avance ; toi, je te préviens à l’avance que je te tenterais sur une affaire d’adultère. « Et sur le soir il arriva que David se leva de dessus son lit etc » (2 Samuel 11 :2). Et le roi David se promenant un soir sur le toit de son palais, et dut toit, il vit une femme en train de faire sa toilette et elle était très belle. Bath-schéba, se lavait la tête derrière un treillis lorsque Satan vint vers David sous la forme d’un oiseau. Et David lui ayant lancé une flèche, le treillis fut brisé et il aperçut Bethsabée. « David fit demander qui était cette femme, et on lui dit: N’est-ce pas Bath-Schéba, fille d’Eliam, femme d’Urie, le Héthien? Et David envoya des gens pour la chercher. Elle vint vers lui, et il coucha avec elle. Après s’être purifiée de sa souillure, elle retourna dans sa maison. Il est ainsi écrit : « Tu as sondé mon cœur, tu l’as visité de nuit, tu m’as examiné, tu n’as rien trouvé; ma pensée ne va point au-delà de ma parole » (Psaume 17:3) »
אמר רב יהודה אמר רב לעולם אל יביא אדם עצמו לידי נסיון שהרי דוד מלך ישראל הביא עצמו לידי נסיון ונכשל אמר לפניו רבש"ע מפני מה אומרים אלהי אברהם אלהי יצחק ואלהי יעקב ואין אומרים אלהי דוד אמר אינהו מינסו לי ואת לא מינסית לי אמר לפניו רבש"ע בחנני ונסני שנאמר בחנני ה’ ונסני וגו’ אמר מינסנא לך ועבידנא מילתא בהדך דלדידהו לא הודעתינהו ואילו אנא קא מודענא לך דמנסינא לך בדבר ערוה מיד ויהי לעת הערב ויקם דוד מעל משכבו וגו’ ויתהלך על גג בית המלך וירא אשה רוחצת מעל הגג והאשה טובת מראה מאד בת שבע הוה קא חייפא רישא תותי חלתא אתא שטן אידמי ליה כציפרתא פתק ביה גירא פתקה לחלתא איגליה וחזייה מיד  וישלח דוד וידרוש לאשה ויאמר הלא זאת בת שבע בת אליעם אשת אוריה החתי וישלח דוד מלאכים ויקחה ותבא אליו וישכב עמה והיא מתקדשת מטומאתה ותשב אל ביתה דכתיב  בחנת לבי פקדת לילה צרפתני בל תמצא זמותי בל יעבר פי
(Talmud de Babylone Sanhédrin 107b)

Yéshoua :
« A moins de naître de nouveau, personne ne peut voir le royaume de Dieu » (Jean 3 :3)

Pharisiens :
« Nos Rabbins ont dit: La génération de ceux qui sont comme morts dans leurs oeuvres, qui viennent et qui prient devant toi à Rosh HaShanah et au Jour du Grand Pardon, tu fais d’eux de nouvelles créatures ... comme il est dit : et le peuple qui sera créé louera  l’Eternel »
רבנן אמרי אלו הדורות שהן כמתים במעשיהם ובאין ומתפללים לפניך ברוש השנה וביום הכיפורים ואתאה בורא אותן בריה חדשה ... ונאמר ועם נברא יהלל יה
(Midrash Téhilim sur Psaumes 102 :18)

Yéshoua :
« Si un homme reçoit la circoncision en un jour de sabbat, afin que la loi de Moïse ne soit pas violée, êtes-vous irrités contre moi de ce que j’ai guéri un homme tout entier en un jour de sabbat »  

Pharisiens :
« Si la circoncision qui s’attache à un seul des deux-cents quarante trois membres du corps humain met le Shabbath en suspens, combien plus le corps tout entier met le Shabbath en suspens! »
ומה מילה שהיא אחד ממאתים וארבעים ושמונה איברים שבאדם דוחה את השבת קל וחומר לכל גופו שדוחה את השבת
(Talmud de Babylone Yoma 85b)

Nombreux sont les chrétiens et autres qui,  face à ces similitudes qui ne semblent pas être un hasard, disent que ce n’est pas Yéshoua qui cite les Pharisiens mais l’inverse. Aussi, disent-ils, certains des points communs entre l’enseignement de Yéshoua et des Pharisiens sont des valeurs universelles. Ils citent comme exemple la règle d’or qui est également énoncé par Confucius et l’Udanavarga, un texte boudhique.  Le fait est, cependant, que ni Conficus ni l’Udanavarga qui ne connaissent pas la Torah d'Israël, n’ont jamais dit comme Hillel ou Yéshoua que l’éthique de réciprocité est le résumé de toute la Torah. D’autre part, Yéshoua, qui était Galiléen, n’a jamais à ce que l’on sache voyagé à l’étranger ni conversé avec des philosophes boudhiques ou orientaux et n’a donc pas pu reprendre leurs enseignements. Par contre, il a discuté, débattu et échangé avec les enseignants de la Torah en son temps ; ce qui fait qu’il est bien plus probable qu’il ait tiré certains de ses enseignements de la sagesse juive de l’époque. Il à rappeler également qu’Hillel qui fait comme Yéshoua de la règle d’or le résumé de la Torah a vécu avant Yéshoua. La similtude est donc forcément dû au fait que Yéshoua cite l’enseignement d’Hillel.  Et si Yéshoua a repris l’enseignement des pharisiens sur un point aussi central que le résumé de toute de la Torah, qu’est ce qui dit qu’il n’en est pas de même pour les autres points communs entre Yéshoua et les pharisiens ? Pour reprendre l’Encyclopédie Juive, « alors que les paroles de Jésus sont simplement des affirmations sans support scripturaire, les Rabbins, qui montrent qu’ils sont dérivés des écritures, établissent leur revendication à la priorité. Ainsi, l’injonction de prier pour l’offenseur (Matt. v. 44) est dérivé (Tos. B. . ix. 29)  des exemples d’Abraham et de Job  (Gen. xx. 17; Job xlii. 8, 10) ; l’idée de trésors célestes (Matt. vi. 20) est dérivé du Deut. cxxii. 34 en relation avec Is. Iii.10 et Ps. xxxi.20 (A. V. 19; Sifre, Deut. 324; comp. Tosef., Peah, iv. 8).  La désapprobation des longues prières (Matt. vi. 7-8), d’Ex. xv. 21 et Nom. xii. 13 (Mek., Beshalla, 3; Sifre, Num. 105; comp. Ber. 39a). Tel est aussi le cas de la phrase « que votre parole soit oui, oui, non, non » (Matt. v. 37) qui est dérivé de Lev. xix. 36 (Sifra, edoshim, viii. 7; B. M. 49a; comp. Tos. Soah vii. 2; Gi. 35a; Nom. R. xxii.) ; Et la condamnation du regard lubrique (Matt. v. 28) du  Deut. xxiii. 9 (‘Ab. Zarah 20a)  et Job xxxi. (Midr., Yalu, sur le passage). Lorsque, dans sa dispute contre les sadducéens, Jésus cite le texte « Je suis le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob » pour démontrer que les patriarches reviendront de nouveau à la vie, car « Dieu est le Dieu des vivants et non des morts », l’argument ne convainc pas celui qui croit dans l’écriture ; mais lorsque Rabban Gamaliel fait référence, face aux Sadducéens, à Deut. xi. 21 ou Ex. vi. 4 : « le pays que l’Eternel a juré à vos pères de leur donner », l’argument est logique et convaincant : «  les morts ne peuvent recevoir, mais ils vivront de nouveau et recevront la terre » (Sanh. 90b). L’originalité est ainsi avec les Rabbins. De la même manière, la belle histoire de la veuve avec deux petites pièces (Marc xii.42-44) trahit son origine midrashique par les mots : «  elle a donné tout ce qu’elle avait pour vivre », qui sont une allusion à la phrase biblique : « ve-nefesh ki taqriv » - litt. Et la vie qui apportera - (Lev. ii. 1), interprétés dans le Lev. R. iii comme signifiant, « le don du pauvre qui inclus sa propre vie dans le don est plus précieux aux yeux de Dieu que toutes les hécatombes du Roi Agrippa ». Ainsi, les étranges parole de Jésus en rapport à la femme adultère : « Que celui de vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle » (Jean viii.7) ne sont probablement que l’écho de l’adage rabbinique ; « c’est seulement lorsque le mari est sans péchés que l’ordalie de la femme suspecte d’adultère est efficace ». Les expressions comme « Si ton oeil droit est pour toi une occasion de chute, arrache-le et jette-le loin de toi » et « si ta main droite est pour toi une occasion de chute, coupe-la et jette-la loin de toi » (Matt. v. 29-30) s’expliquent par des déclarations rabbiniques similaires (Niddah 13b) » (« New Testament » selon l’Encyclopédie juive). Il n’est pas difficile de comprendre que puisque Yéshoua n’a repris les bons enseignements des pharisiens qu’à titre de rappel, il n’était plus nécessaire qu’il s’attarde sur les détails et les démonstrations scripturaires que les maîtres de la Torah avant lui ont déjà exposés aux oreilles du peuple.

Yéshoua, à l’instar les sages d’Israël, enseignait non seulement sous forme de « mashalim » (paraboles), mais même la terminologie et les concepts qu’il emploie se retrouvent dans la littérature rabbinique.

Parabole de Yéshoua :

« C’est pourquoi, quiconque entend ces paroles que je dis et les met en pratique, sera semblable à un homme prudent qui a bâti sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et se sont jetés contre cette maison: elle n’est point tombée, parce qu’elle était fondée sur le roc. Mais quiconque entend ces paroles que je dis, et ne les met pas en pratique, sera semblable à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et ont battu cette maison: elle est tombée, et sa ruine a été grande » (Matthieu 7 :24-27)

Littérature rabbinique :
Un Homme qui accomplit de bonnes œuvres et qui étudie la Torah, à quoi est-il comparé ? A un homme construit en bas avec des pierres et ensuite avec des briques. Même si des eaux nombreuses viennent  contre les murs, ils ne se détachent pas de leurs lieux. Mais un homme qui n’accomplit pas de bonnes œuvres mais qui étudie la Torah, à quoi est-il comparé ? A un homme qui bâtit sur des briques et place par-dessus des pierres.  Il suffit qu’un peu d’eau vienne pour qu’elles s’écroulent.
אדם שיש בו מעשים טובים ולמד תורה הרבה למה הוא דומה לאדם שבונה אבנים מלמטה ואחר כך לבנים אפילו באים מים הרבה ועומדין בצידן אין מחין אותן ממקומן: ואדם שאין בו מעשים טובים ולמד תורה למה הוא דומה לאדם שבונה לבנים תחילה ואחר כך אבנים אפילו באים מים קימעא מיד הופכין אותן:
(Avoth de-rabbi Nathan 24)

Parabole de Yéshoua :
« Car le royaume des cieux est semblable à un maître de maison qui sortit dès le matin, afin de louer des ouvriers pour sa vigne. Il convint avec eux d’un denier par jour, et il les envoya à sa vigne. Il sortit vers la troisième heure, et il en vit d’autres qui étaient sur la place sans rien faire. Il leur dit: Allez aussi à ma vigne, et je vous donnerai ce qui sera raisonnable. Et ils y allèrent. Il sortit de nouveau vers la sixième heure et vers la neuvième, et il fit de même. Etant sorti vers la onzième heure, il en trouva d’autres qui étaient sur la place, et il leur dit: Pourquoi vous tenez-vous ici toute la journée sans rien faire? Ils lui répondirent: C’est que personne ne nous a loués. Allez aussi à ma vigne, leur dit-il. Quand le soir fut venu, le maître de la vigne dit à son intendant: Appelle les ouvriers, et paie-leur le salaire, en allant des derniers aux premiers. Ceux de la onzième heure vinrent, et reçurent chacun un denier. Les premiers vinrent ensuite, croyant recevoir davantage; mais ils reçurent aussi chacun un denier. En le recevant, ils murmurèrent contre le maître de la maison, et dirent: Ces derniers n’ont travaillé qu’une heure, et tu les traites à l’égal de nous, qui avons supporté la fatigue du jour et la chaleur. Il répondit à l’un d’eux: Mon ami, je ne te fais pas tort; n’es-tu pas convenu avec moi d’un denier? Prends ce qui te revient, et va-t’en. Je veux donner à ce dernier autant qu’à toi. Ne m’est-il pas permis de faire de mon bien ce que je veux? Ou vois-tu de mauvais oeil que je sois bon? - Ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers seront les derniers. » (Matthieu 20 :1-16)

Littérature rabbinique :
Le Midrash rapporte que lorsque le fils de rabbi Hiyya mourut jeûne, Rabbi Zéira tint ces propos lors de l’oraison funèbre :

« Un roi possédait un vignoble, et engagea des ouvriers pour y travailler. Il y avait parmi eux un ouvrier qui surpassait les autres de manière incroyable. Que fit le roi? Il le prit par la main et se promena avec lui des heures durant. Le soir venu, les ouvriers se présentèrent pour recevoir leur salaire. Tout le monde reçut un salaire entier. Les ouvriers s’insurgèrent : nous avons travaillé toute la journée, alors que lui n’a travaillé que deux heures, et tu lui donnes un salaire entier ?! Le roi leur répondit : mais il a fait en deux heures plus que ce que vous avez réussi à faire en toute une journée! »
מלך שהיה לו כרם ושכר עליו פועלים והיה שם פועל אחד מתכשר במלאכתו יותר מכולן, כיון שראהו המלך כשר במלאכתו יותר מדאי, אחזו בידו והתחיל מטייל עמו ארוכות וקצרות. לעתותי ערב באו הפועלים ליטול שכרן, ובא אותו פועל ליטול שכרו עמהם, ונתן לו המלך שכרו כמותן, התחילו הפועלים מצירים,  אמרו לו: אדוננו המלך! אנו שיגענו כל היום וזה לא יגע אלא שתים או שלוש שעות ביום, והוא נוטל שכרו כמותינו
(Midrash Ruth Rabbah 5 :7)

Parabole de Yéshoua :
« Que vos reins soient ceints, et vos lampes allumées. Et vous, soyez semblables à des hommes qui attendent que leur maître revienne des noces, afin de lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera. Heureux ces serviteurs que le maître, à son arrivée, trouvera veillant! Je vous le dis en vérité, il se ceindra, les fera mettre à table, et s’approchera pour les servir. Qu’il arrive à la deuxième ou à la troisième veille, heureux ces serviteurs, s’il les trouve veillant ! Sachez-le bien, si le maître de la maison savait à quelle heure le voleur doit venir, il veillerait et ne laisserait pas percer sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts, car le Fils de l’homme viendra à l’heure où vous n’y penserez pas. » (Luc 12:35-40)

« Le roi entra pour voir ceux qui étaient à table, et il aperçut là un homme qui n’avait pas revêtu un habit de noces. Il lui dit: Mon ami, comment es-tu entré ici sans avoir un habit de noces? Cet homme eut la bouche fermée. Alors le roi dit aux serviteurs: Liez-lui les pieds et les mains, et jetez-le dans les ténèbres du dehors, où il y aura des pleurs et des grincements de dents. Car il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus »  (Matthieu 22:12-14)

« Le royaume des cieux sera semblable à dix vierges qui, ayant pris leurs lampes, allèrent à la rencontre de l’époux. Cinq d’entre elles étaient folles, et cinq sages. Les folles, en prenant leurs lampes, ne prirent point d’huile avec elles; mais les sages prirent, avec leurs lampes, de l’huile dans des vases. Comme l’époux tardait, toutes s’assoupirent et s’endormirent. Au milieu de la nuit, on cria: Voici l’époux, allez à sa rencontre! Alors toutes ces vierges se réveillèrent, et préparèrent leurs lampes. Les folles dirent aux sages: Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s’éteignent. Les sages répondirent: Non; il n’y en aurait pas assez pour nous et pour vous; allez plutôt chez ceux qui en vendent, et achetez-en pour vous. Pendant qu’elles allaient en acheter, l’époux arriva; celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces, et la porte fut fermée. Plus tard, les autres vierges vinrent, et dirent: Seigneur, Seigneur, ouvre-nous. Mais il répondit: Je vous le dis en vérité, je ne vous connais pas. Veillez donc, puisque vous ne savez ni le jour, ni l’heure »  (Matthieu 25:1-12)

Littérature rabbinique :

« Rabbi Eliézer dit : Repens-toi un jour avant ta mort. Ses élèves lui ont demandé : Rabbi, un homme peut-il savoir quand il mourra ?  C’est une raison en plus pour lui de se repentir aujourd’hui, de crainte qu’il ne meure demain. Et ainsi doit-il se repentir tous les jours de sa vie. Salomon aussi dit dans sagesse : Qu’en tout temps tes vêtements soient blancs, et que l’huile ne manque point sur ta tête (Ecclésiastes 9:8). Rabbi Yohanan ben Zakkaï disait : Un roi avait invité ses serviteurs à un festin sans leur en préciser la date et l’heure. Les serviteurs intelligents et clairvoyants allèrent se faire beaux et s’assirent à la porte de la maison du roi. Ils dirent : Le roi peut nous appeler d’un instant à l’autre. Les sots allèrent à leur travail en disant : Existe-t-il un festin sans préparation? Il sera toujours temps de nous rendre à la maison du roi. Brusquement. le roi réclama ses serviteurs. Les serviteurs intelligents entrèrent bien vêtus, les sots en habits sales. Le roi se réjouit d’accueillir ses serviteurs bien vêtus et manifesta sa colère à ceux qui étaient sales »
רבי אליעזר אומר שוב יום אחד לפני מיתתך שאלו תלמידיו את ר"א וכי אדם יודע איזהו יום ימות אמר להן וכל שכן ישוב היום שמא ימות למחר ונמצא כל ימיו בתשובה ואף שלמה אמר בחכמתו (קוהלת ט) בכל עת יהיו בגדיך לבנים ושמן על ראשך אל יחסר א"ר יוחנן בן זכאי משל למלך שזימן את עבדיו לסעודה ולא קבע להם זמן פיקחין שבהן קישטו את עצמן וישבו על פתח בית המלך אמרו כלום חסר לבית המלך טיפשין שבהן הלכו למלאכתן אמרו כלום יש סעודה בלא טורח בפתאום ביקש המלך את עבדיו פיקחין שבהן נכנסו לפניו כשהן מקושטין והטיפשים נכנסו לפניו כשהן מלוכלכין שמח המלך לקראת פיקחים וכעס לקראת טיפשים
(Talmud de Babylone Shabbath 153a)

Contrairement aux sadducéens qu’il déclare ne pas connaître les écritures (Marc 12 :42 , Matthieu 22 :9), Yéshoua croyait en la résurrection des morts (Matthieu 22 :30 , Marc 12 :26) et en l’existence des anges (ibid.) et des démons (Marc 7 :29). « Les sadducéens disent qu'il n'y a point de résurrection, et qu'il n'existe ni ange ni esprit, tandis que les pharisiens affirment les deux » (Actes 2 :8). Yéshoua se distingue également des Esséniens. En effet, à l’opposé des Esséniens qui vivaient en marge de la société et qui évitaient de se mêler avec les autres juifs (1QS 8 :13 , Document de Damas 8 :7-9 , 4QMMT frag. 14-21 , 4Q258 8:5-6) au point de ne même pas s’approcher d’un profane (Document de Damas 5 :14-15) et de considérer comme impropres à la consommation les boissons ou aliments touchés par ceux qui, même Juifs, n’ont pas rejoint la communauté et adhéré aux préceptes de la secte (Flavius Josèphe Guerre des Juifs 2:8:8 , 1QS 5 :13-20), Yéshoua qui prie avec les pharisiens, fréquente leurs synagogues « selon sa coutume » (Luc 4 :15-16 , 6 :6-11 , Matthieu 4 :23, Matthieu 12 :9 etc. ) et mange avec eux (Luc 7 :36 , 11 :37 , 14 :1) fréquente et festoie même avec les pécheurs et les gens de mauvaise vie (Marc 2 :15-16 , Matthieu 9 :10-11 , Luc 5 :29-30).  Fidèle à sa tradition familiale, Yéshoua fréquente le Temple (Luc 19 :47 , 21 :37 ,  Matthieu 21 :23 , Marc 12 :45) ne s’oppose pas aux sacrifices qui étaint offerts (Marc 1 :44 , Matthieu 8 :4 et Luc 5 :14) et célèbre les fêtes juives selon le calendrier qui était suivi (Marc 14 :12 , Luc 22 :7-8 , Jean 7 :6-37). Les esséniens, qui avaient leur propre calendrier solaire (livre des Jubilés), rompirent avec le culte du Temple et n’offraient pas de sacrifices (Antiquités judaïques 18:1:5 , Document de Damas 6 :11-14). Il est à rappeler qu’au premier siècle, le culte du Temple était réglé selon l’interprétation pharisienne et les pratiques des autres mouvances n’y étaient pas tolérées (Antiquités judaïques 18 :1 :3-4 , Document de Damas 4 : 18 , 5 :6 , 1QpHab 12 :7 , Talmud de Babylone Yoma 19b). Selon Luc, Joseph et Marie offraient des sacrifices au Temple (Luc 2 :22-24) et y venaient en pèlerinage chaque année pour la Pâque (Luc 2 :41). Comme on aura l’occasion de le voir, Yéshoua se distingue très nettement des Esséniens de par ses positions sur la pureté rituelle et les lois cérémonielles.

Mais Yéshoua  n’a-t-il pas dit en Matthieu de se garder de l’enseignement des pharisiens (Matthieu 16 :6 -12)? En Luc, le « levain des pharisiens » n’est pas leur « enseignement », mais leur « hypocrisie » (Luc 12 :1). Un manuscrit hébreu de l’évangile de Matthieu (Shem Tov) identifie également le levain à la « conduite des pharisiens » - nahagat hapéroushim -  Notons que les pharisiens eux-mêmes étaient conscients de l’hypocrisie parmi leurs rangs et les dénonciations formulées dans la littérature rabbinique contre les religieux hypocrites sont similiares à ce l’on retrouve dans les évangiles.

Evangiles :
« Ne faites pas selon leurs oeuvres.  Car ils disent, et ne font pas.  Ils lient des fardeaux pesants,  et les mettent sur les épaules des hommes,  mais leurs doigts n’y toucheront pas »  (Matthieu 23 :3-5 )

Littérature rabbinique :
« Certains enseignent bien et pratiquent bien, d’autres pratiquent bien mais enseignent mal  et toi tu enseigne bien mais pratique mal » 
יש נאה דורש ונאה מקיים נאה מקיים ואין נאה דורש ואתה נאה דורש ואין נאה מקיים
(Talmud de Babylone Yévamot 63a)

« Certains enseignent bien et pratiquent mal,  d’autres pratiquent bien mais enseignent mal »
יש נאה דורש ואין נאה מקיים נאה מקיים ואין נאה דורש
(Tossefta Hagigah II, 1)

Evangiles :
« Gardez-vous des scribes, qui aiment à se promener en robes longues,  et à être salués dans les places publiques;  qui recherchent les premiers sièges dans les synagogues,  et les premières places dans les festins;  qui dévorent les maisons des veuves,  et qui font pour l’apparence de longues prières.   Ils seront jugés plus sévèrement » (Marc 12 :38 et Luc 20 :45)

« Et ils font toutes choses pour être vus des hommes.  Ils portent de larges phylactères (téfilines),  et ils ont de longues franges à leurs vêtements.  Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites!   Parce que vous dévorez les maisons des veuves, et que vous faites pour l’apparence de longues prières;  à cause de cela, vous serez jugés plus sévèrement » (Matthieu 23 :5 et 14)

Littérature rabbinique :
« Rabbi  Benyamin interpréta l’écriture en rapport aux hypocrites par rapport à la Torah.  Le peuple pense qu’il est un lecteur alors qu’il n’est pas un lecteur, comme répétant [la tradition] alors qu’il ne répète pas. Il se couvre de son manteau et met des téfilines sur sa tête. « Voilà les larmes de ceux à qui on fait tort, et ils n’ont point de consolation » (Ecclésiastes 4 :1).  « C’est à moi de me venger d’eux » dit le Saint Béni soit-il, comme il est dit: «  Maudit soit celui qui fera l’œuvre de l’Eternel frauduleusement » (Jérémie 48 :10) »
ר’ בנימין פתר קרייא בחניפי תורה , סבורים כל עמא שהוא קריין , ולית הוא קריין , תנויי ולית הוא תנויי , עתיף גולתיה ותפילין ברישיה , והנה דמעת העשוקים ואין להם מנחם , אמר הקדוש ברוך הוא : עלי להפרע מהן שנאמר : ארור עושה מלאכת יהוה רמיה
(Midrash Qohelet Rabbah 4 :1)

« Tu ne prendras point le nom de l’Eternel ton Dieu en vain (Exode 20,7) : tu ne dois pas mettre des téfilines  et te couvrir d’un châle de prière  et ensuite commettre des transgressions »
לא תשא את שם יהוה אלהיך לשוא", שלא תהא תפילין נושא וטלית עוטף והולך ועובר עבירות
(Pesiqta Rabbati 22 :5)

Evangiles :
« Malheur à vous,  docteurs de la loi!  Parce que vous avez enlevé la clef de la science;  vous n’êtes pas entrés vous-mêmes,  et vous avez empêché d’entrer ceux qui le voulaient »  (Luc 11 :52-53)

«  Malheur à vous,  scribes et pharisiens hypocrites!  Parce que vous fermez aux hommes le royaume des cieux;  vous n’y entrez pas vous-mêmes,  et vous n’y laissez pas entrer ceux qui veulent entrer »  (Matthieu 23 :13)

« Jésus a dit: Les pharisiens et les scribe  ont reçus les clefs de la connaissance
  et ils les ont cachées.  Ils ne sont pas entrés, et ceux qui voulaient entrer,  ils ne les ont pas laissé faire »
(Thomas 39)

Littérature rabbinique :
« Rabbah b. Rav Houna dit: L’homme qui a la Torah mais qui n’a pas la crainte du ciel est comme le trésorier qui se voit confier les clés de l’intérieur mais pas celles de l’extérieur : comment y entrera t-il ? »
אמר רבה בר רב הונא כל אדם שיש בו תורה ואין בו יראת שמים דומה לגזבר שמסרו לו מפתחות הפנימיות ומפתחות החיצונות לא מסרו לו בהי עייל מכריז
(Talmud de Babylone, Shabbath 31a-b)

Relevons également dans le Talmud de Babylone :

« Les plaies des peroushim: Nos rabbins ont enseigné il s’agit de sept sortes de perushim: le paroush shikhmi, le paroush nikpi, le paroush kizay, le paroush « pilon », le paroush qui dit : « quelle est mon obligation pour que je l’accomplisse », le paroush de l’amour et le paroush de la peur.  Le paroush shikhmi est celui qui agit comme Shékhem (Explication de Rashi: qui s’est circoncis, mais pas pour l’amour de Dieu. De même, [ce pharisien] accomplit des oeuvres pour que les hommes le respectent et non pour l’amour de Dieu).  Le paroush nikpi est celui qui marche avec une humilité exagérée. Le paroush kizay – Rabbi Nahman le fils d’Isaac dit : C’est celui qui fait couler son sang contre le mur [Rashi: qui marche la tête baissée pour ne pas regarder une femme mais qui finit par se heutrer contre un mur et se blesser]. Le paroush pilon –  Rabbah fils de Shilah dit : Sa tête est courbée comme un pilon dans le mortier. Le paroush qui dit : « quelle est mon obligation pour que je l’accomplisse ? » – Mais il s’agit là d’une vertu ! – non, car il dit : « Existe-t-il une autre obligation pour que je l’accomplisse ? » (Rashi: [celui-là dit: Qu’y-a-il encore à faire que je n’ai pas fait, donnant ainsi l’impression qu’il tout fait). Le paroush de l’amour [Rashi : par amour de la récompense du commandement et non par amour du commandement du Créateur] et le paroush de la peur [Rashi: par peur de la punition]. Abbayé et Rabba dirent au tanna : Ne dit pas paroush de l’amour et paroush de la peur , car Rav Yéhoudah dit au nom de Rab qu’un homme doit toujours se consacrer à la Torah et aux commandements , même si ce n’est pas pour des raisons désintéressées , car de cette action égoïste , il finira [tôt ou tard] par les accomplir pour des raisons désintéressées. Ce qui est caché est caché et ce qui est révélé est révélé mais le Grand tribunal punira ceux qui se couvrent de leur manteau. Le Roi Jannée dit à sa femme : Ne crains ni les Pharisiens ni ceux qui le sont pas. Crains plutôt les hypocrites qui se donnent l’apparence de Pharisiens et dont les actions sont comme celles de Zimri mais qui demandent la récompense de Phinéas »
ומכות פרושין וכו’:  ת"ר שבעה פרושין הן פרוש שיכמי פרוש נקפי פרוש קיזאי פרוש מדוכיא פרוש מה חובתי ואעשנה פרוש מאהבה פרוש מיראה פרוש שיכמי זה העושה מעשה שכם פרוש נקפי זה המנקיף את רגליו פרוש קיזאי א"ר נחמן בר יצחק זה המקיז דם לכתלים פרוש מדוכיא אמר רבה בר שילא דמשפע כי מדוכיא פרוש מה חובתי ואעשנה הא מעליותא היא אלא דאמר מה חובתי תו ואעשנה פרוש מאהבה פרוש מיראה אמרו ליה אביי ורבא לתנא לא תיתני פרוש מאהבה פרוש מיראה דאמר רב יהודה אמר רב לעולם יעסוק אדם בתורה ובמצות אפי’ שלא לשמה שמתוך שלא לשמה בא לשמה אמר רב נחמן בר יצחק דמטמרא מטמרא ודמגליא מגליא בי דינא רבה ליתפרע מהני דחפו גונדי אמר לה ינאי מלכא לדביתיה אל תתיראי מן הפרושין ולא ממי שאינן פרושין אלא מן הצבועין שדומין לפרושין שמעשיהן כמעשה זמרי ומבקשין שכר כפנחס:
(Talmud de Babylone Sotah 22b)

En identifiant la « plaie des pharisiens » qui, selon la Mishnah Sotah 3 :4, « détruit le monde », avec ces « sept sortes de pharisiens », la Barayta que reprend le Talmud de Babylone parle donc de sept types de mauvais pharisiens. Selon Abbayé et Rabba, pour lesquels l’amour et la peur font référence à l’amour de la récompense et la peur de la punition, la pratique de la piété visant à la récompense ou pour échapper à la sanction divine n’est pas forcément mauvaise ; raison pour laquelle ils estiment que les « pharisiens de l’amour » et les « pharisiens de la peur » ne sont pas à ranger parmi les pharisiens dont la « plaie détruit le monde ».  Non seulement, donc, le Talmud condamne les Pharisiens hypocrites, mais  la critique talmudique comporte des similitudes avec ce que l’on retrouve dans le Nouveau Testament au niveau des idées et de la stucture. Après avoir énuméré les différentes sortes de mauvais  pharisiens,  le Talmud de Babylone dit que « ce qui est caché est caché et ce qui est révélé est révélé mais le Grand tribunal punira ceux qui se couvrent de leur manteau », autrement dit, même si les hypocrites pensent dissimuler leur vraie nature et se donner l’apparence de piété devant les hommes, rien n’est caché aux yeux du juge suprême, Dieu, devant lequel chacun devra tôt ou tard comparaître. De même, Yéshoua, dans l’évangile de Luc, dit de se garder du « levain des pharisiens, qui est l’hypocrisie » (Luc 12 :1), et poursuit  dans le même esprit que le Talmud : « Il n’y a rien de caché qui ne doive être découvert, ni de secret qui ne doive être connu. C’est pourquoi tout ce que vous aurez dit dans les ténèbres sera entendu dans la lumière, et ce que vous aurez dit à l’oreille dans les chambres sera prêché sur les toits » (Luc 12 :2). Il ne serait pas exagéré de supposer que Yéshoua connaissait la barayta qui a été plus tard couchée par écrit dans le Talmud de Babylone.  

Dans la version du Talmud de Jérusalem, cependant, où les « sept sortes de pharisiens » ne sont pas mentionnés dans le contexte des « plaies des pharisiens », les « pharisiens de l’amour » et les « pharisiens de la peur »,  identifiés à ceux qui pratiquent la Torah par amour ou par crainte de Dieu et qui sont comparés à Abraham et Job le juste, sont considérés comme de bons pharisiens (Talmud de Jérusalem, Bérakhot 9 :6-7). De même, l’authentique tradition pétrinienne qu’a conservée en certains endroits les écrits pseudo-clémentins, qui enseigne que les pharisiens n’étaient pas tous mauvais, déclare que Yéshoua n’a condamné que les « hypocrites parmi les pharisiens, et pas tous. Car à certains, dit-il, l’on devait obéissance puisque le siège de Moïse leur a été confié » (Homélies 11 :29, Reconnaissances 6 :11).

Indiquons malgré tout que même si Yéshoua a certainement perpétué la tradition de l’autocritique pharisienne, les passages où il dit « vous, pharisiens » à la deuxième personne ainsi que certaines expressions d’une extrême agressivité que les évangiles synoptiques lui prêtent ne sont pas authentiques et semblent n’avoir été ajoutées à la tradition évangélique qu’à partir du IIe siècle afin de distancer Yéshoua du judaïsme rabbinique avec lequel le christianisme était alors en conflit. (Voir l'étude complémentaire: Jésus et le judaïsme à la lumière de l'Evangile de Thomas)

 Yéshoua, qui enseigne, se comporte et parle comme un pharisien était donc un pharisien. Yéshoua semble même avoir été respecté par les pharisiens de l’époque. Nous retrouvons par exemple en Luc 13 :31 que « certains pharisiens » ont voulu lui sauver la vie. D’ailleurs, les pharisiens, curieusement, ne sont évoqués nulle part comme ayant participé à l’arrestation et l’exécution de Yéshoua contrairement aux sacrificateurs.  Flavius Josèphe nous raconte que quand Jacques, le frère de Yéshoua, a été par la suite exécuté, cela provoqua la colère des pharisiens de Jérusalem qui se sont mis à protester et  exiger à ce que le responsable, Anan, qui était sadducéen, soit destitué de sa fonction de grand prêtre. Similairement, lorsque les disciples de Yéshoua furent persécutés par les Sadducéens, ce fut « un pharisien, nommé Gamaliel, docteur de la loi, estimé de tout le peuple » qui prit leur défense au Sanhédrin (Actes 5 :34). Yaïr (Jaïrus), « qui était chef de la synagogue » se prosterna devant Yéshoua, témoignant ainsi d’un profond respect à son égard (Luc 8 :41 , Matthieu 9 :18 et Marc 5 :22). Le quatrième évangile atteste que des pharisiens reconnaissaient en Yéshoua un Rabbi agréé par Dieu :

« Mais il y eut un homme d’entre les pharisiens,
nommé Nicodème, un chef des Juifs,
qui vint, lui, auprès de Yéshoua, de nuit, et lui dit:
Rabbi, nous savons que tu es un docteur venu de Dieu » 
 (Jean 3 :1-3)

Il est dit en Actes 15 :5 qu’il existait des individus « de la secte des pharisiens, qui avaient cru », autrement dit, qui professaient sa messianité tout en continuant à appartenir à la « secte des pharisiens ».L’historien Flavius Josèphe, qui était pharisien, tenait Yéshoua en haute estime et voyait en lui un sage. La version authentique du Testimonium Flavianum qu’a redécouverte le professeur Shlomo Pines dit en effet :

«   À cette époque-là, il y eut un homme sage nommé Jésus
dont la conduite était bonne ;
ses vertus furent reconnues.
Et beaucoup de Juifs et des autres nations se firent ses disciples.
Et Pilate le condamna à être crucifié et à mourir.
Mais ceux qui s’étaient faits ses disciples prêchèrent sa doctrine.
Ils racontèrent qu’il leur apparut trois jours après sa crucifixion
et qu’il était vivant.
Il était considéré (par eux) comme le messie
au sujet duquel les prophètes avaient dit des merveilles. »

Les pharisiens eux-mêmes apparaissent comme avoir considéré Yéshoua comme l’un des leurs. En effet, étonnés de voir le laxisme des disciples de Yéshoua vis à vis de la tradition, certains lui font la remarque : « Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens, mais prennent-ils leurs repas avec des mains impures (c’est-à-dire non lavées) ? » (Marc 7 :5 , Matthieu 15 :2). Ou encore : « Pourquoi les disciples de Jean et ceux des pharisiens jeûnent-ils, tandis que tes disciples ne jeûnent point ? » (Marc 2 :18 , Luc 5 :33).  Or,  l’attitude des pharisiens, lesquels s’attendent à ce que les disciples de Yéshoua observent la tradition pharisienne et se comportent comme eux, n’a justement de sens que si les pharisiens considéraient Yéshoua et ses disciples comme appartenant à leur mouvance, c’est-à-dire des pharisiens comme eux.  Nous reviendrons tout à l’heure sur ces passages. Il semble que la chose était réciproque. Dans la version Araméenne des Homélies, en effet, Pierre considère les pharisiens que Yéshoua critiqua comme étant « des nôtres »אנשין מנן  [énashîn minnân] (Homélies 11 :28). Cela donne à entendre que Yéshoua et ses disciples n’avaient pas la conscience de constituer un groupe religieux en dehors du monde pharisien. Yéshoua a également été invité plusieurs fois par des pharisiens à s'attabler avec eux; ce qui prouve que ceux-ci considéraient Yéshoua comme un Juif qui respecte la Torah et les traditions (Luc 7 :36 , 11 :37 , 14 :1). En effet, tout le monde n’avait pas cet honneur selon les évangiles (Matthieu 9 :10-11 , Marc 2 :15-16 , Luc 5 : 29-30)

Puisque Yéshoua était un rabbin intégré à la mouvance pharisienne, nous sommes donc entièrement fondés à expliquer à la lumière de la tradition rabbinique les passages des évangiles qui sont avancés pour défendre l’idée selon laquelle il aurait enseigné que la Torah n’est pas à suivre.

 Ménahem le Nazaréen

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